En 1616, l'iprimeur valenciennois Jean Vervliet publie " Les Rossignols spirituels. Liguez en duo, dont les meilleurs accords, nommément le Bas, relevent du Seigneur Pierre Philippes, Organistes de ses Altezes Sérénissimes". Ce recueil connut un succès certain, ainsi que l'atteste sa réédition de 1621. Les textes poétiques imprimés sans nom d'auteur sont attribués au Père Guillaume Marc. Catéchiste, membre de la Compagnie de Jésus, Guillaume Marc enseigna à l'école dominicale de Valenciennes de 1600 à 1637. Anticipant l'implantation du collège des Jésuites, elle avait été fondée en 1584 en application du plan conciliaire tridentin 'dans le but principal d'apprendre le catéchisme aux enfants pauvres que leur travail empêchait de suivre les classes ordinaires pendant la semaine". Le père Marc avait trouvé le moyen de capter l'attention des enfants "tantôt en formant des chansons spirituelles, tantôt en représentant quelque actionnette [...] à chanter simplement, d'autres en musique [...]".

 

Le thème majeur est évidemment celui de la Contre-Réforme. Il apparaît avec force dans le chant intitulé "L'hérétique, combien pernicieux", qui commence par une déploration sur les malheurs du temps.

 

La fin du recueil comporte des Litanies de la Vierge et un Motet en latin pour l'Assomption composés à quatre voix dans le style du contrepoint fleuri. Les Rossignols spirituels représentent fidèlement le travail de reconquête des âmes entrepris au terme du Concile de Trente, tout particulièrement par l'intermédiaire des Jésuites : il s'agissait non seulement de lutter contre la Réforme - a fortiori dans une ville qui l'avait violemment embrassée - mais aussi de restaurer la foi et les pratiques de dévotion. Le Père Marc apportait la contribution novatrice de ses méthodes actives renforcées par l'usage du chant en langue vulgaire.

 

Guillaume Marc avait confié la réalisation de la basse chantée des Rossignols à Peter Philips, organiste de la Chapelle Royale à Bruxelles. On y trouve l'oeuvre d'un harmoniste plus que d'un contrapuntiste, c'est à dire d'un moderne, rompu aux techniques de l'écriture verticale. Les mélodies se caractérisent par leur grande simplicité. Certains passages "ressentent leur Guédron" selon l'aveu de l'auteur qui ne craint pas de livrer, en ses pièces liminaires, sa recette qui n'est autre que la parodie. S'adressant à l'Abbé de Saint-Amand, Guillaume Marc conseille, pour enrichir la polyphonie à deux voix qui pourrait lui paraître insuffisante, de "former des trios, y pesle-meslant clavicordion". Liberté est donc donnée aux interprêtes d'ajouter une basse continue qui se déduit normalement de l'excellente basse écrite par Peter Philips.

P. Perlot