Jacques-Philippe Lamoninary est né le 14 septembre 1707 à Maroilles. Il est le troisième fils d’Humbert Lamoninary et de Marie-Madeleine Jacquin.

 

Il a seize ans quand il entre à la Chapelle Saint-Pierre pour son apprentissage. Il apparaît en effet pour la première fois sur les comptes de la communauté des joueurs d’instruments de Valenciennes en 1723, où, sous la rubrique des recettes provenant des droits d’apprentissage que payaient ceux qui voulaient « aller jouer en ville », on lit : « Du nommé Moninary, reçu 6 livres. » Vers 1726, Lamoninary entre à la musique de la Chapelle Saint-Pierre en tant que premier violon.

 

Le 6 mars 1734, il épouse à Valenciennes, en l’église Saint-Nicolas, Marie-Madeleine Wyscart. Il donne à partir de 1749, un certain nombre d’œuvres qui paraissent à Valenciennes, en même temps qu’à Paris. Le 27 juin 1749, un privilège général valable douze ans, à compter du 20 juin, lui est accordé pour des "trios à deux violons et basse de sa composition". C'est à l'aide de ce privilège qu'il publie ses oeuvres I, II et III.
 

L'oeuvre I de 1749, intitulé Six sonates pour deux violons avec la basse, est dédiée au marquis de Cernay, lieutenant général des armées du Roi, qui, après avoir encouragé les premiers essais de Lamoninary, ne cesse de lui accorder sa protection. Aussi le musicien lui dédie-t-il tous ses ouvrages.

 

L'oeuvre II, également de 1749, consiste en Six trios pour deux violons et basse. Il est précédé d'un nouvel hommage adressé au marquis de Cernay. Les trios comportent un cadre ternaire uniforme (allegro, mouvement lent, minuetto amoroso) répondant au goût "galant" du Marquis de Cernay. Manifestement, Lamoninary connait la plupart des compositions italiennes qui se sont acclimatées en France vers 1750. Il n'ignore ni Tartini ni Veracini ; il pratique l'écriture courante de la sonate italienne pour deux violions et basse. Il connait aussi les tournures habituelles de Brioschi et de Sammartini et se les approprie. Il utilise la forme sonate bithématique. Toutefois, étant donné l'aspect contourné, fleuri, enchevêtré de la mélodie, ce bithématisme n'apparait pas toujours bien nettement. L'écriture est homophone, les deux violons marchent souvent à la tierce. L'emploi invariable du Minuetto amoroso en guise de finale, et surtout la qualification d'amoroso donnée au menuet, rapprochent Lamoninary de Boccherini dont le Minuetto amoroso caractérise essentiellement le style.

 

Au cours de l'année 1755, il publie son oeuvre III, constitué de Six trios pour deux violons et basse. Ici, l'inspiration devient plus romantique. Sur les six sonates de ce recueil, quatre ont des tonalités mineures. Le style, d'une technique plus avancée, se rattache à la grande école des Geminiani et Veracini.

 

Lamoninary perd sa femme Madeleine Wyscart. En 1753, il se marie en seconde union, à Boulogne, avec Marie-Anne de la Bercomie de Gourdie, veuve de Jacques-Antoine Serin, procureur en la Sénéchaussée du Boulonnais. Suite à ce second mariage, Lamoninary et sa femme habitent Boulogne, sur la place d'Armes près de l'église Notre-Dame et du Collège de l'Oratoire où l'artiste "peut avoir à faire". A son tour, Marie-Anne de la Bercomie meurt subitement le 7 janvier 1754. Lamoninary ne demeure pas longtemps à Boulogne après la mort de sa femme ; en 1757, son nom reparaît parmi ceux des musiciens de Saint-Pierre à Valenciennes.

 

Le 11 janvier 1766, il renouvelle pour dix ans son privilège de 1749, à l'effet de publier "de la musique instrumentale de sa composition". Ce nouvel ouvrage consiste en Six quatuors en simphonie pour deux violons, violoncelle obligé et organo. Oeuvre quatrième gravé par M. Oger. Prix de 12 livres, se vend à Paris aux adresses ordinaires et à Valenciennes chez l'auteur." Cet ouvrage est à nouveau dédié au Marquis de Cernay : "Monsieur, je vous ai fait jusqu'ici l'hommage de mes productions ; j'ose vous supplier d'agréer encore ce nouveau fruit de mon faible talent. Si j'eusse connu quelqu'un, qui, à autant de dignité et de bonté que vous en avez, eut joint un tact plus sur et un discernement plus exsquis ; il eut été mon Mécène. Aux motifs de la plus vive reconnaissance que vous m'avez fournis, j'ose joindre l'expression des sentimens de respect et de vénération dont je suis pénétré et avec lesquels je suis Monsieur, Votre très humble et très Obéissant serviteur."

Par cet ouvrage, Lamoninary prend rang au nombre des musiciens français qui cultivent le genre symphonique et dont la production s'intensifie depuis 1760.

 

On perd sa trace à Valenciennes à partir de 1779. Il retourne alors à Boulogne où il se fixe définitivemnt et donne des leçons de chant et de violon. Le vieux musicien vit misérablement. Sous la Révolution, le bureau des pauvres lui alloue des secours, tantôt en nature, tantôt en espèces. Il meurt dans la misère à l'âge de 95 ans en 1802.

P.Perlot